04-04-2008, 19:17
Voilà voilà, j'ai donc testé en exclusivité pour vous "juré d'assises".
Comment devient-on juré d'assises ? Et bien, tout part d'un tirage au sort sur les listes électorales, à partir de laquelle est établie la liste préliminaire. Il y a ensuite un second tirage au sort qui établi al liste définitive des jurés valable pour une année. Pour être juré, il faut habiter dans le département où l'on vote, et surtout, pour refuser, il faut soit un motif grave, soit s'aquitter d'une amende de 3750 euros.
Il y a enfin un dernier tirage au sort avant chaque session qui établit la liste des jurés titulaires et suppléants. Une session dure 2 ou 3 semaines, il y en a une dizaine par an dans le 06. On n'est juré que pour une session. On est prevenu environ 2 mois avant le début de la session.
Le premier jour de la session, on est reçus le matin par la présidente du tribunal qui nous explique comment ça va se passer.
Il y a grosso-merdo 3 types de fautes dans la juridiction, avec chacune son tribunal: infraction -> tribunal de police, délit -> tribunal correctionnel, crimes -> cour d'assises.
C'est donc aux assises qu'on juge les choses les plus graves (assasinats, viols, ...), et c'est aussi le seul tribunal à disposer d'un jury populaire composé de gens comme vous et moi (il suffit de d'habiter dans le département où l'on vote et de ne pas avoir eu de condamnation supérieure à 6 mois). Le jury se compose de 12 personnes (15 en appel), dont la présidente et 2 assesseurs. Il y a ensuite 9 jurés tirés parmi le "pool" des jurés titulaires (et le cas échéant les jurés suppléants si jamais tous les titulaires sont victimes d'un accident le même jour. En pratique les suppléants sont très rarement appelés à siéger). Selon les affaires, on est aussi amené à tirer un ou plusieurs jurés supplémentaires qui siègent également mais ne participent à la délibération que si un des jurés titulaires a un souci.
On reçoit aussi une explication par un avocat qui explique son rôle (plaider pour la partie civile ou l'accusé) ainsi que le procureur de la république qui explique le rôle de l'avocat général (qui représente la société).
Il y a parfois aussi une visite d'une maison d'arrêt, là on n'a pas eu le temps.
Ensuite on démarre la première affaire, le jury est tiré au sort, les avocats de la défense (i.e. de l'accusé) peuvent récuser 5 jurés, l'avocat général peut en récuser 4. Récuser un juré se fait sur plusieurs critères, en général simplement sur l'intuition de l'avocat ("délit de sale gueule"). Les avoctas ont également la date, lieu de naissance ainsi que professionde tous les jurés. Il peut par exemple aussi arriver qu'un juré femme de 25 ans se fasse récuser sur une affaire de viol où la victime a approximativement le même âge, etc... Les avocats n'ont aucune raison à donner pour récuser un juré.
Une fois le jury constitué, la session commence. On donne la parole à l'accusé, puis le jury lui pose toutes les questions qu'il veut, puis l'accusation, puis l'avocat général, puis les avocats de la défense.
Ensuite les témoins interviennent, à chaque fois 1) interrogé par le jury 2) les avocats de la partie civile 3) l'avocat général 4) les avocats de la défense.
On reçoit aussi des experts, en général psychologue et psychiatre, à la fois pour l'accusé et la victime, les inspecteurs de police qui ont mené l'enquête, éventuellement des médecins légistes, gynécologues (en cas de viol), balisiticens, etc...
L'accusé a un droit de parole après chaque intervenant, il peut être intérrogé à n'importe quel moment par la rpésidente si jamais une question lui vient.
Une fois tout ce beau monde entendu, on donne la parole aux avocats de l'accusation qui peuvent tous plaider s'ils sont plusieurs. Ils ne donnent pas de peine ou d'amende ou de dommages et intérêts, ils montrent juste comment/pourquoi l'accusé a commis les actes dont il a à répondre.
C'est ensuite le réquisitoire de l'avocat général qui doit montrer la culpabilité de l'accusé, et c'est lui qui va requérir une peine de prison, et éventuellement une amende. Les dommages et intérêts sont réglés dans une autre audience.
Enfin la parole va aux avocats de la défense, puis à l'accusé lui-même qui est le dernier à prendre la parole.
Ensuite, le jury se retire dans la salle des délibérés, qui reste fermée jusqu'au verdict. Il n'ya pas de fenêtres.
Dans la salle des délibérés, et bien c'est une simple discussion sur qui pense quoi, chacun nourrissant la réflexion de l'autre, afin que chacun des jurés puisse se faire son intime conviction. Ensuite on vote à bulletin secret sur chacune des questions posées. Par exemple, pour un viol sur mineur de moins de 15 ans avec menace avec arme, on va d'abord voter si oui ou non il y a eu viol, ensuite si oui ou non la personne avait moins de 15 ans au moment des faits, enfin si oui ou non il y a eu menace avec arme (il y a donc vite beaucoup de questions même pour un crime "simple").
Il faut une majorité de 8 voix au moins.
Et pour finir, on vote sur la peine, chacun peut voter n'importe quelle peine entre la peine maximale et minimale. Si une majorité de 8 se dégage, on prend la peine, sinon il y a un second vote. Si une majorité se dégage, on prend la peine, sinon parmi toutes les peines proposées par les jurés, on prend la plus forte, puis on vote entre la peine minimale et cette peine-ci. Si toujours aucune majorité se dégage, on écarte la peine maximale et on prend la suivante plus forte, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'une peine obtienne la majorité de 8 voix au moins.
Ensuite la cour se présente une dernière fois pour annoncer son verdict. L'accusé à 10 jours pour faire appel ou se pourvoir en cassation.
Voilà pour la "technique" !
D'un point de vue personnel, j'ai trouvé que c'était une expérience très très intéressante. Je conseille à tout le monde d'aller suivre au moins une fois un procès aux assises, c'est très intéressant. Du point de vue du juré, on réfléchit pas mal à la valeur de la vie, on voit les choses assez différemment (le JT, les infos à la radio, etc...). C'est très dur du point de vue moral, de se retrouver face à des assassins ou des violeurs, ils sont juste là, et sont comme vous et moi. Mais pour moi le plus dur, ce sont les témoins. Les histoires glauques, on en entend parler, on en voit des choses à la télé, mais on ne voit pas souvent des témoignages. Le discours d'une mère qui a perdu son fils, ou d'une père dont la fille a été violée à 10 par son meilleur ami, c'est très très fort, une grosse décharge émotionnelle. On y repense souvent, et il faut arriver à l'entendre.
Enfin, on a littéralement la vie d'une homme entre les mains. C'est extrèmement difficile de "trouver" la bonne peine, de supporter le fait qu'on envoie quelqu'un en prison pour 10 ans, alors que parfois il reste toujours un doute, infime, certes, mais doute quand même. La peine doit satisfaire tout le monde, l'accusé doit pouvoir conserver un espoir, la victime être reconnue, et la société ne pas être mise en danger. Sur une affaire de viol extrêmement délicate (relation très embrouillée, témoins un peu bizarres, femme peu marquée par les évènements alors que l'accusé était détruit) quel est le bon choix ? 10 ans ? 5 ans ? Bref, une lourde charge à porter dans certains cas, de gros cas de conscience.
Bref, à mon sens, une expérience vraiment enrichissante.
Pour notre session, il ya eu les affaires suivantes:
- viol avec séquestration, coups et blessures, l'accusé a pris 8 ans
- assassinat, destruction d'un véhicule par moyen dangereux, complicité d'assassinat, complicité de destruction.. : 20 ans et 20 ans
- viol sur mineur de moins de 15 ans par ascendant (père adoptif): 10 ans -- l'accusé a fait appel
- viols sur mineurs de moins de 15 ans par ascendant (fille, petite-fille, 2 nièces, fille du meilleur ami, filleule): 13 ans -- l'accusé a 81 ans
- viol avec menace par arme, tentative de viol avec menace par arme, coups et blessures: 5 ans (le viol n'a pas été retenu)
- enlèvement et séquestration pendant 7 jours en vue d'obtenir une rançon, coups et blessures, falsification et utilisation de documents administratifs: 8 ans.
Comment devient-on juré d'assises ? Et bien, tout part d'un tirage au sort sur les listes électorales, à partir de laquelle est établie la liste préliminaire. Il y a ensuite un second tirage au sort qui établi al liste définitive des jurés valable pour une année. Pour être juré, il faut habiter dans le département où l'on vote, et surtout, pour refuser, il faut soit un motif grave, soit s'aquitter d'une amende de 3750 euros.
Il y a enfin un dernier tirage au sort avant chaque session qui établit la liste des jurés titulaires et suppléants. Une session dure 2 ou 3 semaines, il y en a une dizaine par an dans le 06. On n'est juré que pour une session. On est prevenu environ 2 mois avant le début de la session.
Le premier jour de la session, on est reçus le matin par la présidente du tribunal qui nous explique comment ça va se passer.
Il y a grosso-merdo 3 types de fautes dans la juridiction, avec chacune son tribunal: infraction -> tribunal de police, délit -> tribunal correctionnel, crimes -> cour d'assises.
C'est donc aux assises qu'on juge les choses les plus graves (assasinats, viols, ...), et c'est aussi le seul tribunal à disposer d'un jury populaire composé de gens comme vous et moi (il suffit de d'habiter dans le département où l'on vote et de ne pas avoir eu de condamnation supérieure à 6 mois). Le jury se compose de 12 personnes (15 en appel), dont la présidente et 2 assesseurs. Il y a ensuite 9 jurés tirés parmi le "pool" des jurés titulaires (et le cas échéant les jurés suppléants si jamais tous les titulaires sont victimes d'un accident le même jour. En pratique les suppléants sont très rarement appelés à siéger). Selon les affaires, on est aussi amené à tirer un ou plusieurs jurés supplémentaires qui siègent également mais ne participent à la délibération que si un des jurés titulaires a un souci.
On reçoit aussi une explication par un avocat qui explique son rôle (plaider pour la partie civile ou l'accusé) ainsi que le procureur de la république qui explique le rôle de l'avocat général (qui représente la société).
Il y a parfois aussi une visite d'une maison d'arrêt, là on n'a pas eu le temps.
Ensuite on démarre la première affaire, le jury est tiré au sort, les avocats de la défense (i.e. de l'accusé) peuvent récuser 5 jurés, l'avocat général peut en récuser 4. Récuser un juré se fait sur plusieurs critères, en général simplement sur l'intuition de l'avocat ("délit de sale gueule"). Les avoctas ont également la date, lieu de naissance ainsi que professionde tous les jurés. Il peut par exemple aussi arriver qu'un juré femme de 25 ans se fasse récuser sur une affaire de viol où la victime a approximativement le même âge, etc... Les avocats n'ont aucune raison à donner pour récuser un juré.
Une fois le jury constitué, la session commence. On donne la parole à l'accusé, puis le jury lui pose toutes les questions qu'il veut, puis l'accusation, puis l'avocat général, puis les avocats de la défense.
Ensuite les témoins interviennent, à chaque fois 1) interrogé par le jury 2) les avocats de la partie civile 3) l'avocat général 4) les avocats de la défense.
On reçoit aussi des experts, en général psychologue et psychiatre, à la fois pour l'accusé et la victime, les inspecteurs de police qui ont mené l'enquête, éventuellement des médecins légistes, gynécologues (en cas de viol), balisiticens, etc...
L'accusé a un droit de parole après chaque intervenant, il peut être intérrogé à n'importe quel moment par la rpésidente si jamais une question lui vient.
Une fois tout ce beau monde entendu, on donne la parole aux avocats de l'accusation qui peuvent tous plaider s'ils sont plusieurs. Ils ne donnent pas de peine ou d'amende ou de dommages et intérêts, ils montrent juste comment/pourquoi l'accusé a commis les actes dont il a à répondre.
C'est ensuite le réquisitoire de l'avocat général qui doit montrer la culpabilité de l'accusé, et c'est lui qui va requérir une peine de prison, et éventuellement une amende. Les dommages et intérêts sont réglés dans une autre audience.
Enfin la parole va aux avocats de la défense, puis à l'accusé lui-même qui est le dernier à prendre la parole.
Ensuite, le jury se retire dans la salle des délibérés, qui reste fermée jusqu'au verdict. Il n'ya pas de fenêtres.
Dans la salle des délibérés, et bien c'est une simple discussion sur qui pense quoi, chacun nourrissant la réflexion de l'autre, afin que chacun des jurés puisse se faire son intime conviction. Ensuite on vote à bulletin secret sur chacune des questions posées. Par exemple, pour un viol sur mineur de moins de 15 ans avec menace avec arme, on va d'abord voter si oui ou non il y a eu viol, ensuite si oui ou non la personne avait moins de 15 ans au moment des faits, enfin si oui ou non il y a eu menace avec arme (il y a donc vite beaucoup de questions même pour un crime "simple").
Il faut une majorité de 8 voix au moins.
Et pour finir, on vote sur la peine, chacun peut voter n'importe quelle peine entre la peine maximale et minimale. Si une majorité de 8 se dégage, on prend la peine, sinon il y a un second vote. Si une majorité se dégage, on prend la peine, sinon parmi toutes les peines proposées par les jurés, on prend la plus forte, puis on vote entre la peine minimale et cette peine-ci. Si toujours aucune majorité se dégage, on écarte la peine maximale et on prend la suivante plus forte, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'une peine obtienne la majorité de 8 voix au moins.
Ensuite la cour se présente une dernière fois pour annoncer son verdict. L'accusé à 10 jours pour faire appel ou se pourvoir en cassation.
Voilà pour la "technique" !
D'un point de vue personnel, j'ai trouvé que c'était une expérience très très intéressante. Je conseille à tout le monde d'aller suivre au moins une fois un procès aux assises, c'est très intéressant. Du point de vue du juré, on réfléchit pas mal à la valeur de la vie, on voit les choses assez différemment (le JT, les infos à la radio, etc...). C'est très dur du point de vue moral, de se retrouver face à des assassins ou des violeurs, ils sont juste là, et sont comme vous et moi. Mais pour moi le plus dur, ce sont les témoins. Les histoires glauques, on en entend parler, on en voit des choses à la télé, mais on ne voit pas souvent des témoignages. Le discours d'une mère qui a perdu son fils, ou d'une père dont la fille a été violée à 10 par son meilleur ami, c'est très très fort, une grosse décharge émotionnelle. On y repense souvent, et il faut arriver à l'entendre.
Enfin, on a littéralement la vie d'une homme entre les mains. C'est extrèmement difficile de "trouver" la bonne peine, de supporter le fait qu'on envoie quelqu'un en prison pour 10 ans, alors que parfois il reste toujours un doute, infime, certes, mais doute quand même. La peine doit satisfaire tout le monde, l'accusé doit pouvoir conserver un espoir, la victime être reconnue, et la société ne pas être mise en danger. Sur une affaire de viol extrêmement délicate (relation très embrouillée, témoins un peu bizarres, femme peu marquée par les évènements alors que l'accusé était détruit) quel est le bon choix ? 10 ans ? 5 ans ? Bref, une lourde charge à porter dans certains cas, de gros cas de conscience.
Bref, à mon sens, une expérience vraiment enrichissante.
Pour notre session, il ya eu les affaires suivantes:
- viol avec séquestration, coups et blessures, l'accusé a pris 8 ans
- assassinat, destruction d'un véhicule par moyen dangereux, complicité d'assassinat, complicité de destruction.. : 20 ans et 20 ans
- viol sur mineur de moins de 15 ans par ascendant (père adoptif): 10 ans -- l'accusé a fait appel
- viols sur mineurs de moins de 15 ans par ascendant (fille, petite-fille, 2 nièces, fille du meilleur ami, filleule): 13 ans -- l'accusé a 81 ans
- viol avec menace par arme, tentative de viol avec menace par arme, coups et blessures: 5 ans (le viol n'a pas été retenu)
- enlèvement et séquestration pendant 7 jours en vue d'obtenir une rançon, coups et blessures, falsification et utilisation de documents administratifs: 8 ans.
Recule fils!!!
Bravo mon Shef !